[Côte d’Ivoire] Plus de 18 ans après sa création : le Centre de santé urbain à base communautaire de Vridi 3 à la recherche d’un meilleur fonctionnement #santé

[Côte d’Ivoire] Plus de 18 ans après sa création : le Centre de santé urbain à base communautaire de Vridi 3 à la recherche d’un meilleur fonctionnement #santé

-La communauté exige le départ du Directeur du District sanitaire et du gestionnaire du centre

-Le Csucom de Vridi 3 : tout sauf un centre de santé

-Le ministère de la Santé promet sa rouverture

La fermeture du Centre de santé urbain à base communautaire (Csucom) de Vridi 3 ou quartier Zimbabwe,  le 21 septembre 2016, par le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique (Mshp), en rajoute à la souffrance de la population, cette bourgade précaire de 24 000 habitants. Après plusieurs appels à la rouverture officielle de ce centre de santé de premier contact, le ministère de la Santé se mure dans un silence inquiétant. La communauté a fait monter  la tension d’un cran le mercredi 10 janvier 2018, pour exiger le départ du Directeur du District sanitaire et du gestionnaire du centre, ainsi que et la rouverture de l’établissement sanitaire.

À la faveur d’un sit-in pacifique, des manifestants de Vridi 3, quartiers précaires d’environ 24 000 habitants ont exigé la réouverture du centre de santé et le départ du Directeur du District sanitaire (DD) de Kouamassi-Port-Bouët, Dr Angaman Ekponon Dominique et du gestionnaire du centre de santé, M’Bro Fernand Gomez. De bouche à oreille, les femmes, filles, jeunes et badads se sont retrouvés par vagues successives, pancartes en main pour dire leur ras-le-bol. ‘’Nous sommes fatigués’’, ‘’On veut notre centre de santé’’, ‘’Ouvrez notre centre de santé’’, ‘’DD, dégage avec ton gestionnaire’’ etc.

Les dames sont sorties nombreuses pour manifester leur mécontentement

Les écriteaux  sur les morceaux de carton qui faisaient office de pancarte en disaient long. Les visages peu radieux des manifestants exprimaient leur souffrance et leur mécontentement. « Nous sommes fatiguées. Depuis la fermeture du centre, il y a plus d’un an, les femmes éprouvent d’énormes difficulté quand elles doivent accoucher », a indiqué la porte-parole, l’octogénaire, Koné Salimata.

L’incident malheureux du 7 août 2016, après l’accouchement de Mme Sinaré Barakissa, au cours duquel, une sage-femme a commis une faute professionnelle qui a failli coûter la vie à la parturiente, suivi de  la fermeture du Csucom par le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique le 21 septembre 2016, n’est pas la  solution.

Après avoir parcouru les CHU de Treichville et Cocody d’août 2016 à juillet 2017, subie cinq différentes opérations et plusieurs mois d’hospitalisation, dame Barakissa se porte,  apparemment mieux. Elle n’a pas voulu se faire raconter la manifestation.

Très affaiblie, elle n’est pas restée en marge de ce ‘’mouvement de solidarité’’: « C’est une cause commune même si je garde un mauvais souvenir du centre. J’ai appris qu’il y’aura une nouvelle gestion, donc il est bon de rouvrir le centre très vite

Sa fille née le 7 août 2016, Sinaré Zénabe Soumaya (nom que lui donne la famille) attend l’ouverture du centre pour être déclarée à la naissance. Un autre problème qui tient à cœur  la famille. « Les responsables du centre attendent sa réouverture avant de déclarer l’enfant qui a aujourd’hui  un an, cinq mois », a affirmé Mme Barakissa.

Au centre, Mme Sinaré Barakissa

C’est avec émotion que Mme Kindo Fatoumata, présidente des femmes burkinabè témoigne: «C’est une bonne idée du ministère de la Santé de revoir le fonctionnement et la gestion de cet établissement de premier contact. Mais, le temps mis pour sa rouverture fait que les femmes enceintes dorment la peur au ventre, surtout quand elles sont à terme ». Pire, c’est avec regret qu’elle évoque le cas de dame Makata Wellet Agali, qui, après avoir accouché seule, le 25 novembre 2017 a rendu l’âme. « Le centre de santé étant fermé, il fallait trouver un véhicule et subir les péripéties du mauvais état de la route pour son évacuation à l’hôpital général de Port-Bouët, ensuite au Chu de Treichville. Malheureusement, Makata Wellet Agali a rendu l’âme », regrette notre interlocutrice. Quant à l’orphelin, Drissa Yatura ‘’il est aux soins de sa belle sœur’’, poursuit la présidente des femmes burkinabè.

Les femmes ne sont pas seules, elles ont le soutien du chef. Approché, le chef central des communautés, Djedji N’Guessan Augustin, s’interroge encore sur les raisons du retrait de l’ambulance qui aidait la communauté pour  les évacuations  qui nécessitaient une urgence. « Après la fermeture du centre de santé en septembre 2016, il y a une ambulance qui a été placée en permanence ici, mais un mois après, elle a été retirée, sans explication», témoigne le chef central des communautés. Ajoutant par ailleurs, «chacun se débrouille comme il peut en cas d’évacuation d’un patient ».

C’est les larmes aux yeux que le chef central des communautés partage son inquiétude: « Nous avons effectué plusieurs démarches, en vain. Nous sommes inquiets aujourd’hui, parce qu’il y a des décès qu’on peut éviter avec la rouverture du centre de santé ». Toujours à la recherche d’une âme généreuse, M. Djedji se confond en  interrogations : « Je veux savoir,  si c’était à Cocody ou à Treichville, un hôpital peut être fermé plus d’un an sans qu’on trouve un moyen de le remplacer ? ou bien, on considère que nous sommes dans un quartier précaire et on nous ignore. Aujourd’hui, nous sommes à la recherche de bonnes volontés, pour venir aider nos populations, parce que la situation est intenable ».

Le centre de santé attend sa rouverture, mais… Les émissaires du ministère de la Santé et ceux de la mairie de Port-Bouët sont arrivées aux  environs de 11h30min, au moment où la tension était vive. Les manifestants réclamaient  à l’unisson le départ du DD et du gestionnaire et la présence de la ministre de la Santé ‘’ou rien’’.

Sur place, happé par la foule, et face à la montée de la colère des manifestants, l’inspecteur général de la Santé a, au nom de la délégation, rassuré les manifestants quant à la rouverture du centre ‘’dans un bref délai’’.

Pour éviter que le pire ne se produise, la délégation de cinq personnalités du ministère de la Santé, le Directeur de la Santé, Pr Samba Mamadou ; l’Inspecteur général de la Santé, Dr Jean Denoman ; le Directeur régional de la Santé-Abijan II, Dr Anouan Jean, le Directeur de la Santé Communautaire, Touré Brahima, le Directeur du District sanitaire (DD) de Kouamassi-Port-Bouët, Dr Angaman Ekponon et des émissaires de la mairie de Port-Bouët, SAF DSK , Bambahui Barnabé, le Secrétaire général N’Dri Ludovic ainsi que le PCA, Traoré Saïdou ; le chef central des communautés,  Djedji N’Guessan Augustin et les autres chefs des autres communautés (plus de 20 personnes) se sont entretenues pendant plus d’heure d’horloge  à l’église catholique, Diocèse  de Grand-Bassam, Paroisse cœur immaculé de Marie de Vridi 3, située en face du centre.

À la visite du centre, le décor laisse transparaître le danger qui menace les populations. Les lavabos et le dispositif de lavage des mains situés juste à l’intérieur sont devenus vétustes.

Un infirmier diplômé d’Etat, habillé en blouse et quelques aides-soignantes, assurent le service minimum au dispensaire qui, lui, est resté ouvert. Ils ne peuvent faire que, quelques pansements et des consultations « Nous travaillons de 8 à 14h à cause de la fermeture du laboratoire et de la maternité», indiquent-ils.

La maternité quant à elle, dispose d’un lit totalement hors d’usage, avec des installations désuètes. Les matériels de soin et l’immobilier sont  en ruine.

C’est au pas de course, sans heurts, sous escorte policière (appelée à quelques minutes du départ) que les hôtes de la communauté de Vridi 3, ont quitté le centre de santé.

Dans l’après-midi, au cabinet ministériel, le directeur de la Santé communautaire, Pr  Samba Mamadou a indiqué que le Centre a été fermé ‘’pour préserver la santé des populations riveraines’’.

Quant à la réouverture qui a mis du temps qui, du coup a eu un écho favorable, voici ce qu’il a dit : « Mme la ministre nous a donné des instructions pour l’ouverture de ce centre fin décembre 2017, afin de soulager les populations, notamment les plus vulnérables, les femmes et les enfants. Nous étions surpris de la manifestation de ce matin. Cette date n’a pu être honorée du fait des conflits d’agenda. Cependant, la délégation qui s’y est rendue, a rassuré la population que ce sera chose faite d’ici la fin du mois de janvier 2018 ».

Les populations de l’aire sanitaire de Vridi 3, attendent depuis plus de dix huit ans des soins de proximité acceptables comme dans certains établissements sanitaires de premier contact où la qualité des services et la performance des équipements ne laissent pas de place à de mauvais commentaires.

Sériba Koné

                

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