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[Côte d’Ivoire/Verdict de la Cadhp] La guerre de la communication autour de la CEI

Abidjan, 16-07-2020 (crocinfo.com) Le verdict de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cadhp) du 15 juillet 2020 dans l’affaire Suy Bi Gooré Émile et autre contre la République de Côte d’Ivoire fait feu de tout bois tant dans le camp de l’opposition que de la majorité présidentielle.

Alors que l’opposition salue cet Arrêt de la Cadhp, car estimant qu’il est en sa faveur pour une réforme de la Commission électorale indépendante (CEI), la majorité présidentielle estime, en ce qui le concerne, que la décision de la cour désavoue l’opposition.

Dans un communiqué lu par le ministre de la Communication, Sidi Touré, la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples a, à travers ce verdict, estimé que la Commission Électorale Indépendante issue de cette réforme est composée de membres indépendants et impartiaux, que cette CEI est équilibrée dans sa composition et qu’elle jouit d’une indépendance institutionnelle.

Le porte-parole du gouvernement ivoirien a également estimé que la Cour africaine « n’a constaté aucune violation en ce qui concerne le droit de participer librement à la direction des affaires publiques, ni en ce qui concerne la question de l’égal accès à la fonction publique du pays ».

Une déclaration qui fait grand bruit en ce moment en Côte d’Ivoire, parce que pour l’opposition, le ministre de la Communication a fait une interprétation très partisane de l’arrêt rendu par la Cour africaine. Selon elle, cela montre clairement que le gouvernement a décidé de choisir le bras de fer plutôt que l’apaisement, dans un contexte marqué par les préparatifs des prochaines échéances électorales présidentielles, qui s’annoncent être un tournant décisif pour le pays.

Par ailleurs, l’opposition reproche  au porte-parole du gouvernement d’avoir volontairement omis de dire que la Cadhp a ordonné à l’État de Côte d’Ivoire de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’organisation de nouvelles élections  au niveau des CEI locales et ce, dans un délai de 3 mois. Il lui est également signifié d’avoir délibérément omis de dire que la Cour a ordonné à la Côte d’Ivoire de revoir le processus de nomination des représentants des partis d’opposition et de la Société civile au sein de la CEI, en leur confiant entièrement cette tâche, et cela dans un délai de 3 mois.

24 heures après cette décision de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, une guerre de communication autour de la CEI est donc ouverte entre l’opposition et le parti au pouvoir, car chaque partie interprète l’Arrêt selon ses propres intérêts.

Dans ce combat de titans qui prend des allures inquiétantes à 3 mois de la présidentielle, le peuple quant à lui, retient son souffle.

Faut-l le rappeler, en avril dernier, la Côte d’Ivoire avait pris ses distances avec la Cour africaine des droits de l’homme. Elle avait retiré sa déclaration de reconnaissance de la compétence de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples.

Concrètement, en ne reconnaissant plus cette compétence, la Côte d’Ivoire empêche les individus ou les ONG de déposer des plaintes directement devant cette Cour. Toujours membre de la Cour africaine, la Côte d’Ivoire devient ainsi le quatrième pays à retirer sa déclaration de compétence, après le Bénin, le Rwanda et la Tanzanie.

Georges Kouamé

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