[Édito] Le cumul de postes, une illusion de pouvoir

[Édito] Le cumul de postes, une illusion de pouvoir

Le cumul des postes en Côte d'Ivoire soulève des questions sur l'efficacité et la responsabilité des dirigeants. Analyse des risques liés à cette concentration du pouvoir et appel à une gouvernance plus équitable.

Bouaké, le 16 septembre 2024 (crocinfos.net) – Dans le paysage politique ivoirien, il est de ces figures emblématiques qui semblent incarner le pouvoir à eux seuls. Notre Ministre-Député-Maire, Président de Conseil Régional en est un exemple frappant. À première vue, la multiplication des casquettes peut sembler être une solution efficace, une manière de centraliser le pouvoir pour mieux servir les citoyens. Mais, à y regarder de plus près, cette approche soulève des questions essentielles sur la gouvernance, l’efficacité et, surtout, la responsabilité.

Le cumul de plusieurs postes de haute responsabilité peut donner l’illusion d’un homme-orchestre capable de résoudre tous les problèmes d’un seul coup. Pourtant, cette concentration de pouvoirs est souvent synonyme de dilution des responsabilités. En effet, comment un individu peut-il véritablement s’investir dans quatre rôles aussi exigeants sans risquer de se perdre dans les méandres de ses diverses missions ? Le résultat est souvent le même : une inefficacité croissante, des décisions floues et, au final, des citoyens laissés sur le bord de la route.

Regardons de plus près ce phénomène. En Côte d’Ivoire, la Haute Autorité de la Bonne Gouvernance (HABG) a été instituée pour veiller à la transparence et à l’intégrité des actions publiques. Pourtant, face à des cumuls de postes aussi manifestes, il est légitime de se demander si cette autorité joue réellement son rôle. La gouvernance doit être une affaire collective, reposant sur des compétences diversifiées et une représentation équitable des différents segments de la société. En concentrant tant de pouvoirs entre les mains d’un seul homme, on court le risque d’ériger une structure pyramidale où l’avis des autres devient secondaire, voire superflu.

‘’Comment un individu peut-il véritablement s’investir dans quatre rôles aussi exigeants sans risquer de se perdre dans les méandres de ses diverses missions ? Le résultat est souvent le même : une inefficacité croissante, des décisions floues et, au final, des citoyens laissés sur le bord de la route.’’

Il est important de rappeler que la bonne gouvernance repose sur des principes de responsabilité, de transparence et d’efficacité. En ayant plusieurs casquettes, notre Ministre- Député -Maire, Président de Conseil Régional risque de devenir cet acrobate qui, trop occupé à jongler, finit par laisser tomber toutes les balles. Les citoyens, qui attendent des réponses claires à leurs préoccupations, se voient souvent confrontés à des discours vagues et des promesses non tenues. La confiance, une des pierres angulaires de la démocratie, s’effrite alors lentement, mais sûrement.

De plus, la situation actuelle soulève une question plus large : celle de la légitimité. Un homme peut-il vraiment représenter efficacement plusieurs intérêts aussi différents que ceux d’un Ministre, d’un maire, d’un Député et d’un Président de conseil régional ? La diversité des défis auxquels chaque poste est confronté exige une attention et une expertise spécifiques. En mélangeant tout cela, on risque de confondre les priorités, de brouiller les messages et, finalement, de ne pas répondre aux attentes des citoyens.

Il est temps de repenser notre approche de la gouvernance. Plutôt que de voir le cumul de postes comme une opportunité de centralisation, il serait plus judicieux de considérer la collaboration et la délégation comme des vecteurs de progrès. Encourager le travail en équipe, promouvoir des leaders compétents et diversifiés à différents niveaux, cela conduira à une meilleure gestion des affaires publiques, et, surtout, à une réelle écoute des besoins de la population.

En somme, notre Ministre-Député-Maire-Président de Conseil Régional  bien qu’intentionné, doit se rendre à l’évidence : la bonne gouvernance ne se mesure pas à la quantité de responsabilités cumulées, mais à la qualité de l’engagement et à l’efficacité des actions mises en œuvre. La Haute Autorité de la Bonne Gouvernance a un rôle crucial à jouer dans ce processus de prise de conscience. Elle doit veiller à ce que la gouvernance soit synonyme de service public, et non de monopole de pouvoir.

Alors, chers dirigeants, il est temps d’ouvrir la voie à une gouvernance éclairée, où chaque voix compte, où chaque acteur joue son rôle sans se perdre dans les cumuls de postes qui ne mène qu’à la confusion. La route vers une gouvernance efficace et responsable est encore à tracer, mais il est grand temps de s’y engager pleinement.

François M’BRA II, Correspondant Région de Gbêkê


En savoir plus sur Crocinfos

Subscribe to get the latest posts sent to your email.

CATEGORIES
TAGS
Share This

En savoir plus sur Crocinfos

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading