[Forum Assinie-Mafia] Appel à la réinvention de la presse ivoirienne

Abidjan, le 1^er octobre 2024 (crocinfos.net) – Le Forum Assinie-Mafia, organisé du 26 au 28 septembre 2024 à Assinie-Mafia, a réuni une centaine d’experts venus des médias, de la communication, de l’économie et de la politique. Ce grand rassemblement, placé sous le thème “Presse ivoirienne : aux sources de la performance et de la gouvernance économiques”, avait pour objectif de réfléchir sur les défis économiques et de gouvernance que la presse ivoirienne affronte aujourd’hui, plus de 30 ans après le retour du multipartisme.

‘’En Côte d’Ivoire, entre 1990 et 1996, on comptait 178 titres de presse. Aujourd’hui, seuls 22 quotidiens subsistent, témoins d’une mortalité impitoyable des publications.’’

À l’époque, les années 90 avaient marqué un tournant décisif avec la libéralisation de l’audiovisuel et la naissance de nombreuses chaînes de télévision et radios. Mais ce printemps des médias a laissé place à une désillusion amère, marquée par des difficultés économiques, une précarité croissante du métier de journaliste, et un environnement juridique et économique toujours imparfait. En Côte d’Ivoire, entre 1990 et 1996, on comptait 178 titres de presse. Aujourd’hui, seuls 22 quotidiens subsistent, témoins d’une mortalité impitoyable des publications.

Les participants du forum, issus de divers secteurs, ont longuement débattu sur les voies de sortie de cette crise. Ils ont convenu que l’avenir de la presse repose sur une réinvention totale du modèle économique et éditorial. Cet appel, baptisé « L’APPEL du Forum Assinie-Mafia », a été adressé à plusieurs acteurs clés.

Les institutions et autorités administratives sont appelées à soutenir davantage le secteur, en favorisant la création de champions nationaux de la presse et en assainissant l’environnement économique et juridique. De leur côté, les acteurs des médias sont invités à opérer une rupture avec le modèle économico-politique actuel, source de parti-pris et de désinformation. Il est urgent d’adopter une gouvernance éditoriale vertueuse et d’impacter durablement la société ivoirienne.

Lors du Forum Assinie-Mafia

Le forum souligne aussi l’importance d’un engagement du secteur privé à investir dans les médias, afin de rehausser l’image de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique sur la scène internationale. Les autorités de régulation doivent renforcer leurs actions pour professionnaliser le métier de journaliste et responsabiliser les médias dans la gestion de leur capital humain et économique.

‘’Les institutions et autorités administratives sont appelées à soutenir davantage le secteur, en favorisant la création de champions nationaux de la presse et en assainissant l’environnement économique et juridique.’’

Enfin, l’enseignement supérieur est sollicité pour rendre la formation des journalistes plus accessible, et les partis politiques sont appelés à soutenir le développement de l’écosystème des médias sans ingérence. La société civile doit jouer un rôle de vigie en défendant fermement la liberté de la presse.

Pendant les trois jours qu’a duré ce forum, panels, conférences et débats ont permis de générer des échanges pertinents et riches. L’enjeu principal reste la capacité de la presse ivoirienne à sortir de son impasse actuelle et à amorcer une véritable révolution cognitive et stratégique.

Ce changement de paradigme, comme l’ont répété les intervenants, est vital pour que la presse redevienne un vecteur des mutations sociales, économiques et politiques à venir en Côte d’Ivoire. Si la presse ivoirienne veut retrouver son rôle crucial, elle doit s’émanciper des influences politiques qui l’enferment dans un journalisme de soumission. Le forum appelle donc à un grand basculement vers une presse indépendante, capable de gérer de manière autonome ses choix éditoriaux, ses orientations technologiques, et son avenir économique.

Cette révolution nécessaire vise à transformer la presse en un acteur influent, non seulement dans le débat public, mais aussi dans la conduite des réformes qui s’imposent dans le pays.

Charles Kpan