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[Journée internationale des enfants-soldats] La réinsertion des enfants-soldats dans la région des Grands lacs

Des enfants soldats démobilisés dans un centre de réhabilitation à Gitega au Burundi le 10 décembre 2004. / Esdras Ndikumana/AFP

Alors que le monde célèbre ce lundi 12 février la journée internationale des enfants-soldats, des milliers d’enfants sont toujours engagés dans des conflits à travers le monde. Des associations locales et internationales s’activent pour sauver des enfants-soldats de l’emprise des groupes armés à travers la démobilisation et la réinsertion.

Seize ans après la promulgation de la Convention relative aux droits de l’enfant, interdisant leur implication dans les conflits armés, le continent africain compte le nombre le plus important d’enfants soldats.

Le monde compte plus de « 250 000 enfants-soldats impliqués dans des conflits armés, la moitié se trouve en Afrique », indique le dernier rapport du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef). Il s’agit des mineurs (âgés de 6 à 18 ans) qui ont été kidnappés ou recrutés de force dans des groupes armés. Ils sont utilisés indifféremment sur le terrain de bataille : combattants, boucliers humains, objets sexuels, messagers ou espions.

Depuis les années 1990, ces enfants-soldats sont notamment utilisés dans le cadre de conflits armés répétitifs en Afrique centrale notamment en RDC, au Rwanda et au Burundi.

Contre ce fléau, des associations humanitaires tentent de démobiliser des dizaines de milliers d’enfants soldats à travers le monde. C’est le cas du « Groupe d’Action pour la Démobilisation et la Réinsertion des enfants-soldats » (Gaderes) : « Ne pas donner à ces enfants une chance de retrouver leur place dans la collectivité serait catastrophique pour l’avenir de la société. Ces enfants délaissés pourraient devenir de véritables bombes à retardement et continueraient une spirale de la violence dans l’enlisement des conflits », explique Clovis Kadda Bathy-Polo, son directeur.

Les enfants-soldats de « véritables bombes à retardement »

Le Gaderes travaille depuis 1999 en partenariat avec l’Unicef et Amnesty International pour reprendre des enfants-soldats des mains de chefs de milices. « « Nous travaillons en réseau avec le programme” Désarmement, Démobilisation, Réintégration” (DDR) de l’ONU, ainsi qu’avec l’Unicef pour accueillir des enfants qui viennent des différents groupes armés, raconte encore Clovis Kadda Bathy-Polo. Nous avons démobilisé plus de 4 800 enfants-soldats avec l’appui de nos partenaires. Ce processus a permis de redonner une place à part entière à ces enfants pour la prise en charge et la rééducation », ajoute le responsable de cette association locale qui pilote un réseau plus de 50 ONG et organisations religieuses à travers toutes les provinces de la RD-Congo.

Dans tous les cas, les enfants-soldats reviennent avec de graves handicaps physiques et psychiques. C’est là que se pose avec acuité la question de la prise en charge selon l’état psychologique de chacun.

« Nous faisons de notre mieux pour accueillir tous les enfants qui nous arrivent de toutes les milices. Nous suivons de près l’évolution de chacun d’entre eux avec l’équipe de nos psychologues et médecins », assure Clovis Kadda. Des séances d’écoute psychologiques sont élaborées pour faire parler les enfants de leurs pires expériences.

« Les premières semaines, nombre de démobilisés font des cauchemars, ne ferment pas l’œil la nuit. Cela nous exige un accompagnement supplémentaire pour les amener à dédramatiser leurs récits de vie », confie un encadreur de l’Association psychotechnique pour la réintégration des enfants-soldats à Cibitoke, au nord-ouest du Burundi.

Il en est de même de « la réhabilitation des enfants qui sont privés de tout repère familial et rejettent toute forme d’autorité parentale. Ceux-ci reçoivent un accompagnement psychologique pendant quatre à douze semaines. »

La délicate réinsertion des enfants-soldats colombiens

Ce n’est qu’après cette première étape thérapeutique qu’un enfant peut amorcer un cursus scolaire ou un apprentissage. La remise à niveau scolaire passe généralement par l’alphabétisation de ces enfants, qui n’avaient pas fréquenté l’école.

À la longue, l’espoir est que « les enfants-soldats réintégrés prennent le relais pour conscientiser à leur tour les autres enfants-soldats », soutient Christel Rocheteau, déléguée générale de l’association internationale « S.O.S. enfants », qui se déploie dans toute la région des Grands Lacs aux côtés des partenaires locaux, notamment l’Association des Actions et Projets pour un développement durable (Aprojed).

Simon Bumba a achevé une formation en menuiserie dans le cadre du programme de réinsertion des enfants-soldats démobilisés à Goma, à l’est de la RDC. Il témoigne : « Je suis un enfant issu des forces armées et groupes armés. Je suis resté trois ans dans l’armée, où j’ai été enrôlé quand j’avais quatorze ans. Là, j’étais au service des rebelles et j’ai tué plusieurs personnes. J’ai été récupéré par l’association” Actions et Projets pour un développement durable”, qui est soutenu par”S.O.S. enfants’’, pour une réinsertion socioprofessionnelle. Aujourd’hui je suis capable de fabriquer quelques meubles, tels qu’un tabouret, une chaise, une table… J’espère être capable dans deux ans de me prendre en charge, à travers mon métier de menuisier. »

www.la-croix.com par Jean-Paul Musangania

 

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