Abidjan, le 8-6-2022 (crocinfos.net) Ce mardi 7 juin, j’ai pris part à l’Assemblée nationale, à l’élection du nouveau président, qui est désormais et jusqu’à la fin de cette législature, l’honorable Adama Bictogo.
Personnellement, je pense qu’il mérite amplement ce poste et que le président Ouattara et son parti, en le soutenant, lui ont rendu simplement justice… Après mon vote, j’ai dû partir sans attendre les résultats de cette élection dont l’issue était connue d’avance après l’appel du PDCI, du PPA-CI et de l’UDPCI, à voter pour lui. J’ai dû partir non pas parce que la suite ne m’intéressait pas, mais parce que j’avais une urgence à gérer dans une grande clinique de la place.
Ce 7 juin au matin, en allant au parlement, puis dans le parlement, j’ai éprouvé un certain malaise au sujet de ma qualité de député. C’est que, en suivant les infos, j’ai appris que le Premier ministre anglais a failli perdre son poste à la suite d’un vote de défiance orchestré par des députés de son parti dont 148 ont voté pour sa démission de son poste.
Pour quel motif ces députés ont agi ainsi? Eh bien parce qu’ils estiment que le Premier ministre s’est moqué du peuple anglais en organisant une fête au cours de laquelle il a dansé, mangé et bu en plein confinement, pendant qu’il était interdit au peuple qui a fait de lui le Premier ministre de l’Angleterre, de se livrer à ce genre de comportement sous peine de fortes amendes.
À la suite de cette information, je n’ai pu m’empêcher de dire: ‘’Il en a de la chance le peuple anglais, d’avoir des députés si déterminés à le défendre’’. Sur le chemin du parlement, je n’ai fait que penser à cette action des députés anglais et ce, jusque dans la salle où j’ai retrouvé mes honorables collègues flanqués de leur écharpe aux couleurs du pays. Pendant des minutes et en écoutant les allocutions, je me suis posé la question: À quoi nous servons, nous autres députés Ivoiriens?
Est-ce que nous défendons notre peuple, ceux qui ont fait de nous des députés, comme le font les députés anglais où les députés dans les grandes démocraties ? Il y a quelques mois de cela, mon épouse est tombée malade et sa santé ne s’améliorant pas au bout de 72 heures, j’ai dû l’accompagner dans une grande clinique de la place où elle a passé près d’une semaine sous une prise en charge médicale efficace.
À sa sortie de l’hôpital et malgré la batterie d’examens et d’analyses effectués, grâce à mon assurance parlementaire dont elle bénéficie également, je n’ai dépensé que moins de 100 mille F, là où sans cette assurance, j’aurai payé près de 600 mille F et mon épouse n’aurait pas été acceptée dans cette clinique sans que je ne verse au préalable une caution de 300 mille francs.
Pour avoir été élu député, avec seulement une prime de 80 mille francs prélevée sur mon traitement de député, ma famille et moi sommes soignés presque gratuitement, en cas de maladie et cela grâce au peuple et à son argent.
‘’Qu’est ce que je fais pour ces gens? Quel combat je mène dans le pays avec mon titre de député, pour que les ressources publiques servent plus efficacement au bien-être du peuple?’’
Pourtant, ceux qui, de par leur bulletin de vote m’ont offert ces avantages importants, sont refusés dans les mêmes cliniques faute d’argent. Pourtant, ceux qui ont voté pour m’offrir ces avantages meurent parfois dans leur maison, de privations diverses et faute d’argent pour faire face parfois, à une ordonnance de seulement 10000 FCFA. Qu’est ce que je fais pour ces gens? Quel combat je mène dans le pays avec mon titre de député, pour que les ressources publiques servent plus efficacement au bien-être du peuple?
Je me suis engagé en politique parce que j’estime que la politique doit être faite dans l’intérêt exclusif du peuple et uniquement dans son intérêt. Parce que j’estime que la politique doit être faite pour que les gens vivent mieux, pour construire un avenir meilleur pour les enfants du pays, pour transformer en profondeur la société, la société de confiance et non la société du bruit.
C’est pour cela qu’en tant que député, je suis au quotidien en train de défendre la cause des Ivoiriens et que dans la ville dont je suis le député, je forme les populations à la prise de conscience et à la compression des vrais enjeux du développement, à la défense de l’intérêt public et à l’évitement de la tromperie politique.
‘’Je suis venu à la politique par conviction profonde et la volonté de changer des choses, d’améliorer les conditions de vie des gens. Je ne suis pas venu à la politique pour faire du spectacle et gaspiller mon énergie dans des combats sans lendemains et sans intérêt pour le peuple de Côte d’Ivoire’’.
Le combat que je mène en ce moment contre des sociétés de téléphonie mobile en raison des vols qu’elles opèrent dans la poche des Ivoiriens s’inscrit dans cette ambition et cet engagement pour la cause des Ivoiriens.
Quand je suis arrivé à la mairie de Tiassalé en janvier 2019, j’ai été choqué de voir qu’alors que mes enfants étaient tranquillement à suivre des cours dans des écoles privées, les enfants de ceux qui m’ont installé à la mairie par leur vote, se faisaient renvoyer des classes à cause des cotisations des COGES, à cause de 1000 F, 2000 F, 3000 F. Dans les mois qui ont suivi, j’ai mis fin aux cotisations Coges sur le territoire de la commune et la mairie a fait face aux charges des Coges avec les taxes municipales payées par les populations.
Je suis venu à la politique par conviction profonde et la volonté de changer des choses, d’améliorer les conditions de vie des gens. Je ne suis pas venu à la politique pour faire du spectacle et gaspiller mon énergie dans des combats sans lendemains et sans intérêt pour le peuple de Côte d’Ivoire.
‘’Les événements judiciaires qui se déroulent sous nos yeux avec des officiers de police présumés acteurs de trafic international de drogue, en sont une illustration éloquente’’.
Mais chaque jour je me sens si impuissant devant le désarroi des populations et mes efforts apparaissent comme une goute d’eau dans l’océan des souffrances autour de moi, pendant que nous utilisons la politique pour défendre des causes partisanes, pour détruire ou pour diviser le peuple dont l’analphabétisme majoritaire est une source intarissable de profits et de blanchiment de richesse miraculeuse. Les événements judiciaires qui se déroulent sous nos yeux avec des officiers de police présumés acteurs de trafic international de drogue, en sont une illustration éloquente.
À quoi nous servons nous les élus de la nation quand les cris de notre peuple ne trouvent aucun écho dans notre douce insouciance? À quoi nous servons nous les élus de la nation quand sous nos yeux, se construit inexorablement une société de contre-valeurs et d’enrichissements miraculeux d’agents publics à la sueur du peuple pour narguer le peuple?
À quoi nous servons quand des entrepreneurs, véritables créateurs de richesses et d’emplois, sous le poids des impôts et des difficultés d’accès aux crédits, ferment boutiques et jettent au quotidien des pères et des mères de famille au chômage pendant que dans l’administration publique, des agents publics corrompus et sans scrupules sont à la fête avec l’argent public pendant que d’autres s’installent dans des trafics de tous genres et la création de sociétés fictives?
Nous sommes des élus du peuple, paraît-il. Mais devant le spectacle auquel nous assistons, je me demande si nous méritons cette appellation. Devant nos absences, la confiance de notre peuple dans la politique et les institutions, petit à petit, s’érode à une vitesse préoccupante. Quand on ajoute à cela l’invasion des faux modèles, le cocktail sociétal devient explosif et nous sommes tous en danger.
ASSALE TIEMOKO, député Ivoirien