Bouaké, Côte d’Ivoire, le 16 octobre 2023 (crocinfos.net)—En nommant ce lundi 16 octobre 2023, Robert Mambé Beugré au poste de Premier ministre et chef du gouvernement, lui demandant de former son équipe « dans un bref délai », le Président Alassane Ouattara a dribblé tous les pronostiqueurs. Mieux, comme le dit Yao Noël, « le Président de la République a sorti le grand jeu en faisant mentir et divaguer tous ceux qui font des nominations sur Facebook ». Disons-le tout net. Tout le monde pensait à tout le monde sauf à Beugré Mambé. Certains avaient pensé à des technocrates, d’autres à des proches collaborateurs du chef de l’Etat. D’aucuns même entrevoyaient la reconduction de Patrick Achi. Alassane Ouattara, une fois de plus, a fait comprendre aux uns et aux autres, qu’il est « le détenteur exclusif du pouvoir exécutif » pour prêter cette expression de Yao Noël.
Le Président Ouattara s’est certainement appuyé sur des qualités de l’ancien Gouverneur du district autonome d’Abidjan. Pour succéder à Patrick Achi, également homme de mission, connu pour son calme olympien, il faut s’appeler Beugré Mambé. La maitrise de soi devant des situations presqu’inextricables est son fort. Un retour en arrière nous fait comprendre que le nouveau Premier ministre a la carapace dure. Le monde l’a connu en octobre 2005, quand il a été élu à la tête de la Commission électorale indépendante (CEI), alors que la Côte d’Ivoire était en pleine crise militaro-politique, divisée en deux parties, dans l’attente d’une élection présidentielle qui n’arrivait jamais. Tout se passait bien jusqu’en janvier 2010 où les barons de l’ancien régime dirigé par Laurent Gbagbo s’en prennent à lui, l’accusant d’avoir tenté d’inscrire frauduleusement quelques 429 000 personnes sur la liste électorale. Beugré Mambé, cadre du PDCI et de l’opposition d’alors, avait vu sa dignité bafouée mais n’avait pas craqué. Laurent Gbagbo venait de faire d’une pierre deux coups. Il réglait ainsi des comptes à deux niveaux. Il provoquait le limogeage de Mambé et la démission du gouvernement pour couper des têtes devenues encombrantes. Très réservé, nous (quelques journalistes) avions rencontré Beugré Mambé dans une villa aux II Plateaux, après son débarquement en février 2010. Ce samedi-là, très affaibli par le poids des accusations, l’homme ne craquait pourtant pas. Durant la trentaine de minutes d’échange, il n’avait fait que parler de Dieu qui, selon lui, ferait éclater la vérité. Pour faire face à l’insurmontable, Ouattara peut compter sur Mambé.
Son sérieux au travail plaide également pour lui. Le jeudi 14 décembre 2017, Beugré Mambé recevait une médaille d’or qui, selon Adama Ouane, l’administrateur général de l’organisation internationale de la Francophonie (OIF), est la plus haute distinction de l’institution qui récompense la réussite des 8e jeux de la Francophonie à Abidjan qui venaient de se dérouler du 21 au 30 juillet 2017. Il en avait été l’organisateur de ces jeux. Pour seule réponse à cette distinction, le récipiendaire affirmait. « Tout acte qui nous sera confié, nous l’exécuterons avec humilité », ajoutant, « on n’est jamais intelligent tout seul ». Venant du fils d’un prédicateur protestant, allons-y comprendre quelque chose. Avec l’humilité qui le caractérise, Mambé pourra aisément poursuivre l’œuvre laissée par Patrick Achi.
OUATTARA ABDOUL KARIM, correspondant dans le Gbêkê