Sassandra, le joyau caché de la Côte d’Ivoire (Par Vincent Toh Bi Irié)
Vincent Toh Bi Irié, le président de la plateforme citoyenne ‘’Aube Nouvelle’’ nous emmène dans une randonnée à Sassandra, une perle méconnue de la Côte d'Ivoire avec ses plages vierges, ses bâtiments coloniaux préservés et le site historique de Drewin, où l'histoire de l'esclavage est encore palpable. Un trésor à protéger et à promouvoir pour un tourisme durable. Entre histoire et merveilles naturelles.
-Connais-tu mon beau pays ? Sassandra
Abidjan, Côte d’Ivoire, le 21 août 2024 (crocinfos.net)—Si ce pays nous était réellement conté dans tout ce qu’il a de merveilleux, il serait beaucoup plus adoré qu’il ne l’est.
Au détour d’une mission de Aube Nouvelle, j’ai redécouvert Sassandra et ses merveilles.
Cette localité qu’un grand nombre ignore et dépasse pour la localité plus phosphorescente de San Pedro est un véritable trésor.
Ses dizaines de kilomètres de plages, vierges et vides, dans lesquelles s’enfoncent une nature luxuriante et des blocs de pierres déposés par Dieu sont juste sublimes.
Au Centre-Ville, les bâtiments coloniaux, plus vieux et conservés que ceux de Grand-Bassam, donnent juste l’impression que nous sommes en 1946. On se demande comment un tel diamant est si négligé.
Juste à quelques kilomètres de la ville, se trouve un site historique du patrimoine mondial à Drewin: des vestiges du commerce des esclavages.
‘’La cave où ils étaient bestialement « stockés» avant d’être vendus aux hommes blancs est encore intacte.’’
Les Neyo, Godie, Kodia, Bakwe, hommes et femmes robustes, que la nature a dotés d’une force extraordinaire, étaient capturés dans les forêts et sur les rivages de la mer et vendus là. La cave où ils étaient bestialement « stockés» avant d’être vendus aux hommes blancs est encore intacte. Comme nous sommes paresseux, négligents et ignorants de notre potentiel historique et culturel , c’est l’UNESCO qui est venue de très loin pour poser le petit bloc de béton d’un mètre carré pour fermer et protéger l’entrée de l’étroit tunnel de l’enfer par lequel les esclaves vendus rejoignaient les cales des bateaux négriers.
J’ai failli étouffer quand j’ai appris qu’il y a quelques années des forgerons indélicats ont pris les restes des fers et des chaînes servant à attachés les esclaves pour en faire des marmites !!!
Quand le tourisme sera un peu plus sérieux, deviendra une priorité nationale et fera l’objet de politiques volontaristes, nous ajouterons beaucoup de dizaines de milliards annuels à notre richesse nationale, attirerons du monde de qualité et porterons le nom de notre pays au fronton des Nations admirables.
Il ne sert pas à grand-chose d’afficher le nom de notre pays sur les maillots de grands clubs de football ou de créer des bureaux de tourisme dans les grandes Capitales Occidentales, si ceux qui veulent s’aventurer dans notre pays hors d’Abidjan n’ont même pas d’hôtels décents pour se loger et s’ils ne savent pas ce que voir.
Avec les merveilles de Bouna et du grand Est, les authenticités et les vestiges dans le grand Nord, les paysages uniques à l’Ouest, les traditions exceptionnelles au Centre et au Sud, les circuits touristiques n’offrent pourtant presque rien d’impressionnant.
À ma dernière visite à Man, j’avais constaté, que des personnes détruisaient impunément la forêt dans le périmètre direct des fameuses cascades pour y construire des maisons. Personne ne dit rien. Quand notre mémoire nationale voudra restituer l’authenticité des cascades, c’est en ce moment que nous découvrirons qu’il faut faire déguerpir ces gens.
Quand je vivais à Johannesburg, en Afrique du Sud, je voulais faire abattre un vieil arbre de la cour de ma maison dont des branches étaient déjà tombées sur le toit à l’occasion de tornades. On m’a opposé un refus parce que l’arbre faisait partie du paysage de la municipalité. On ne joue pas avec ce qui fait l’attraction d’une ville. Un ami, propriétaire d’une maison voulait procéder à une modification de sa maison. C’est là qu’il a découvert que cette maison qu’il a achetée faisait partie du patrimoine historique Sud-Africain. Bien que propriétaire reconnu et officiel, il ne pouvait pas modifier sa propre maison. Raison invoquée : Nelson Mandela y avait tenu une réunion secrète pendant la clandestinité, sous l’apartheid. Où sont ici les lieux historiques d’Houphouët-Boigny ou des fondateurs et bâtisseurs de notre pays ?
‘’Je reste convaincu que la professionnalisation du tourisme absorbera, entre autres immenses avantages, une partie du chômage des jeunes.’’
Il y a quelques jours, j’étais au Panama. Les étrangers paient 17 dollars (un peu plus de 10.000 FCFA) pour juste s’asseoir dans une tribune et voir les bateaux passer dans le Canal de Panama, connaître les étapes historiques de la construction et le film qui retrace la souffrance des hommes qui l’ont réalisé. Chez nous, qui connaît l’histoire du Canal de Vridi et les sacrifices de nos pères pour le construire ?
À des niveaux plus basiques, beaucoup de réceptifs hôteliers de l’intérieur du pays donnent le vertige. Par leur amateurisme et leur état déplorable. Avec des draps autrefois blancs, une propreté approximative, des finitions hasardeuses, des employés peu professionnels, les hôtels n’incitent pas à aller en évasion à l’intérieur.
Certes, les maquis font partie de notre patrimoine culinaire et certains touristes viennent en Côte d’Ivoire rien que pour ça. Mais ça fait quoi si on met un peu de propreté et d’ordre dans beaucoup de ces maquis ?
Je reste convaincu que la professionnalisation du tourisme absorbera, entre autres immenses avantages, une partie du chômage des jeunes.
Il me semble enfin que, le tourisme, ce n’est pas l’organisation simple de voyages, mais un savant dosage d’aménagement du territoire (développement), de mise en valeurs des terroirs (culture), de spécificités historiques (Histoire), de promotion de la nature (Environnement), d’exposition de l’âme des peuples d’une région (Sociologie) et de la célébration de l’humanité (Amour).
Venez à Sassandra maintenant car dans 5 ou 10 ans, vous pourriez le regretter.
Vincent Toh Bi Irié, président de la plateforme citoyenne ‘’Aube Nouvelle’’
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