Soyons des inventeurs de l’éthique minimale ! Par Pascal Roy

Soyons des inventeurs de l’éthique minimale ! Par Pascal Roy

Les êtres humains doivent être au centre de toute action politique. La tâche fondamentale devrait être de trouver des solutions qui servent le bien de tous les êtres humains en vue du développement d’une société respectant la dignité de tous nos semblables. Autrement dit, savoir mettre la politique au service de la personne humaine et non se vautrer dans des œuvres qui desservent les communautés, les peuples et les états: vol, corruption, affairisme, gabegie, sectarisme, manipulation, dictature, injustice, indignité…

Si la politique peut sembler inutile à certains à cause des déboires de beaucoup de dirigeants politiques et des désillusions malheureuses subies par les peuples, elle revêt néanmoins une utilité réelle pour toute population. Au-delà de l’utilité d’une structuration de la vie en société, la politique permet également de la faire évoluer.

Dans notre monde en crises où errent nos peuples déboussolés, la politique doit redevenir la boussole des nations. Oui la politique assainie qui ne saurait être la simple juxtaposition de mesures législatives et de recettes économiques. La politique comme un souffle qui propulse les nations sur le chemin de la grandeur, car la somme des intérêts particuliers ou catégoriels ne saurait définir l’intérêt général des peuples. Il ne s’agit pas de nier et ignorer la réalité de notre monde, de nos environnements. Mais il est nécessaire quand on s’engage en politique, de se donner des objectifs, de fixer un cap, de se référer à une ambition, à une philosophie, d’avoir une vision globale du monde, de nos sociétés et qui mène les citoyens vert le haut.

Un projet ambitieux pour nos états revient à redonner aux populations une vision globale nouvelle, adaptée à notre temps, de leur proposer une ambition collective, mobilisatrice des énergies, condition de leur accomplissement individuel.

‘’Savoir mettre la politique au service de la personne humaine et non se vautrer dans des œuvres qui desservent les communautés, les peuples et les états: vol, corruption, affairisme, gabegie, sectarisme, manipulation, dictature, injustice, indignité…’’

La politique ne peut rimer ni avec l’impuissance angoissée ni avec le volontarisme irréfléchi. Il faut de la clairvoyance, de la vision, du talent, une équipe fertile et cela nécessite de la formation. On ne réussit rien de durable et d’historique avec des collaborateurs stériles ou qui s’agitent dans la mangrove. Il faut une équipe qui sait s’inciter constamment à penser, à panser, à travailler et à chercher. Ce qui suppose le savoir de ce qui est en question, au-delà du factuel et dans la saisie de l’essence des choses. La politique comme une œuvre qui rassemble et construit suppose un autre rapport à la parole, la parole nous confiant la pensée comme une fiancée, dans la mesure où la parole est sa maison et son agir doit prendre de la hauteur et se vêtir de grandeur et de sens.

”La politique ne peut rimer ni avec l’impuissance angoissée ni avec le volontarisme irréfléchi.”

La politique se fonde alors essentiellement sur le refus de considérer autrui et le monde comme des objets manipulables, comme des moyens adaptés à des fins au sein d’une totalité close où dominent le principe de plaisir, la nuisance, le profit et la volonté de puissance. Ce refus avait été formulé par Emmanuel Kant, dans les Fondements de la métaphysique des mœurs,  de la manière suivante : « Agis de façon telle que tu traites l’humanité, aussi bien dans ta personne que dans toute autre, toujours en même temps comme fin, et jamais comme moyen ». Il a été repris sous une autre forme par Emmanuel Levinas dans la thématique de la vulnérabilité du visage du prochain comme présence de l’infini dans le fini et par Hans Jonas, dans Le Principe Responsabilité, qui considère que nous avons des devoirs moraux et politiques envers la nature et envers les générations futures : « Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une vie authentiquement humaine sur terre ». Être responsable, c’est accepter d’être « pris en otage » par ce qu’il y a de plus fragile et de plus menacé.

L’État nous doit la liberté mais nous nous devons à l’État si nous voulons préserver la différence entre État et administration, c’est-à-dire entre le gouvernement des hommes par eux-mêmes et l’administration des choses. On gouverne les hommes, on ne les administre pas !

‘’La politique se fonde alors essentiellement sur le refus de considérer autrui et le monde comme des objets manipulables, comme des moyens adaptés à des fins au sein d’une totalité close où dominent le principe de plaisir, la nuisance, le profit et la volonté de puissance’’

Evitons de faire du progrès du savoir, une illusion ! Les avancées démocratiques et les compétitions politiques ne doivent pas se couvrir du masque trompeur d’obscurs intérêts.

Il nous faut savoir nous situer à hauteur des enjeux de responsabilité individuelle, collective et de sens que la vie en commun nécessite.

Sortons du temps des promesses et des proclamations.

Docteur Pascal ROY

Juriste, Philosophe et Diplômé de Sciences politiques

Enseignant-Chercheur des Universités

Chercheur-Associé à l’Institut Catholique de Paris

Membre-Associé à la Société Française de Philosophie

Ecrivain et Chroniqueur

www.docteurpascalroy.com

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