[Côte d’Ivoire Révision de la liste électorale du 18 au 24 juin 2018] La société civile qualifie de ‘’bilan mitigé pour une opération controversée !’’ (Déclaration)
Le Groupe de plaidoyer et d’actions pour une transparence électorale (Gpate) estime que révision de la liste électorale en Côte d’ivoire qui s’est déroulée du 18 au 24 juin 2018, donne un ‘’bilan mitigée pour une opération controversée’’. Cette association est un réseau d’organisations de la société civile ivoirienne, constituée de l’APDH, du MIDH d’AMNESTY INTERNATIONAL, de l’ADJL-CI, de l’ASSELCI, de CIVIS-CI et de RIDDEF.
Dans un communiqué de presse dont nous avons reçu copie, ce jour, le groupement fait le point de cette opération. « L’heure est maintenant au bilan aux termes de l’opération de révision de la liste électorale qui s’est déroulé du 18 au 24 juin 2018 en Côte d’Ivoire », indique le communiqué d’entrée de jeu.
Ainsi, poursuit le communiqué le mardi 26 juin, au cours d’un point de presse, M. Gervais Coulibaly, vice-président de la commission électorale indépendante(CEI) chargé de la liste électorale, a annoncé que la CEI avait enregistré l’inscription de 428 233 nouveaux électeurs. Un chiffre en progression comparé à ceux issus des opérations passées, notamment la dernière révision de la liste électorale en 2016. Il a ensuite exprimé sa satisfaction devant ce progrès qui pour lui dénote de la réussite de l’opération.
Au regard de ce bilan, le groupe de plaidoyer et d’actions pour une transparence électorale, dans le cadre de ses missions de suivi et d’évaluation du processus électorale, a fait les analyses suivantes :
–une opération conduite par une CEI contestée
Le GPATE note que la réforme de la CEI, réclamée par les organisations de la société civile engagées dans la défense des Droits de l’Homme et de la démocratie et la quasi-totalité des partis politiques de l’opposition, ainsi que le PDCI, membre de la coalition au pouvoir, n’est pas encore effective, en dépit de la décision de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples qui avait accordé un délai ne devant pas excédé une année à compter de la date du prononcé de l’Arrêt.
Le GPATE rappelle que ce délai est largement expiré depuis le 17 novembre 2017. « Le refus de réformer la CEI par le Gouvernement, accroit les risques de contestations et de conflits post-électoraux dans une nation déjà fragilisée par les blessures mal cicatrisées de la crise post-électorale de 2010-2011 », a indiqué M. Fernand GAUZE, Président d’ADJL-CI, et Vice-Président du GPATE.
Quant au Dr KOUAME Christophe, Président de CIVIS-Côte d’Ivoire, il estime que « Le Gouvernement rate ainsi une énième occasion de rassembler les ivoiriens autour d’un sujet d’intérêt national comme la révision de la liste électorale ».
Le GPATE exhorte donc le Gouvernement ivoirien à aller résolument vers l’exécution de l’arrêt de la haute juridiction Africaine.
-une opération émaillée de violence
Depuis le démarrage de cette opération de révision de la liste électorale, la presse a rapporté des cas de violences dans diverses localités, perturbant ainsi le bon déroulement de cette opération. Même si aucune perte en vie humaine n’a été signalée, on déplore tout de même des blessés graves. C’est le cas des villes ou communes de Divo, du Plateau, d’Agboville, de Didiévi, Aboisso etc.
« Ces violences viennent en rajouter au discrédit de cette opération, en empêchant ainsi plusieurs personnes d’exercer librement leur droit de s’inscrire sur la liste électorale par crainte de subir des représailles ». a déploré Abraham Denis YAUROBAT, Président du GPATE.
-un délai insuffisant, aggravé par la période de saison pluvieuse et les examens scolaires
Dès l’annonce de cette opération, le GPATE avait dénoncé le délai d’une semaine qui lui était imparti, le trouvant insuffisant pour enrôler les nombreux ivoiriens en attente. Mais plus grave, les nombreuses pluies diluviennes qui se sont abattues sur le pays avec leur cortège de désastre ont encore réduit ce temps d’enrôlement.
Le GPATE regrette qu’en dépit de ces raisons évidentes qui auraient logiquement entrainé une prorogation du délai d’enrôlement, le gouvernement soit resté ferme sur le délai annoncé au départ de cette opération. Le GPATE note qu’une fois encore le gouvernement dénie à de nombreux citoyens leur droit inaliénable de figurer sur la liste électorale afin d’exercer leur droit fondamental de citoyen.
-des allégations de fraudes persistantes
Durant le déroulement de l’opération, la presse a fait échos de nombreuses allégations de fraudes qui l’auraient émaillée, et qui ont été stigmatisées par des états-majors s’accusant mutuellement. Pour Me Doumbia Yacouba, « cette situation, si elle est avérée, est de nature à hypothéquer sérieusement l’intégrité et la crédibilité des futures élections dont le présent fichier électoral en préparation constitue un maillon important ».
-un convoyage scandaleux d’électeurs
Une autre caractéristique marquante de cette opération de révision de la liste électorale, a été bel et bien le phénomène de convoyage des électeurs. Si cette pratique n’est pas nouvelle en soi, et trouve son fondement dans l’application de l’article 9 du code électoral, la dimension qu’elle a prise au cours de cette opération a atteint des proportions inquiétantes. Du fait de ce phénomène qui gagne en intensité, certaines listes électorales pratiquement crû du simple au double.
Partant de ce constat, Nathalie Kouakou, vice-présidente du GPATE et ancienne Présidente de Amnesty Internationale Côte d’Ivoire, estime que « si ce phénomène n’est pas vigoureusement combattu et endigué à temps, il pourrait porter un grave préjudice au jeu démocratique dans le choix des élus locaux ».
Les recommandations du GPATE
Au regard de ce qui précède, le GPATE a fait les recommandations suivantes :
-Il invite le gouvernement à se conformer à la décision de la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples et de réformer sans délai la CEI, pour garantir des élections transparentes et crédibles en Côte d’Ivoire et éloigner ainsi définitivement le spectre de violences électorales et post-électorale répétitives et lassantes, qui sapent les processus électoraux dans notre pays, et dont les menaces sont perceptibles sur les futures élections.
-Le GPATE appelle également le gouvernement à privilégier une démarche inclusive, participative et transparente, dans le règlement des questions concernant les cadres légaux et les réformes institutionnelles en Côte d’ivoire.
-Il l’exhorte à créer sans délai, le cadre et les conditions idoines d’un dialogue politique incluant toutes les parties prenantes au processus électoral, notamment les partis politiques, qu’ils soient dans l’opposition ou au gouvernement, à l’effet de trouver impérativement, un consensus national autour du processus électoral.
-Invite la CEI en attendant sa réforme, à commanditer une enquête indépendante en vue d’élucider les nombreuses allégations de fraudes, à l’effet de rassurer tous les candidats et les électeurs.
Kpan Charles
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