[Gestion de la réserve naturelle Dalhiafleur] Vers la destruction de l’écosystème naturel du site

[Gestion de la réserve naturelle Dalhiafleur] Vers la destruction de l’écosystème naturel du site

Dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie Sublime Côte d’Ivoire, conformément aux priorités du Programme cadre de gestion des aires protégées de Côte d’Ivoire, le ministère du Tourisme ne lâche pas prise la violation du site de la réserve naturelle de Dalhiafleur d’une superficie de 148 hectares. Un fait qui provoque une levée de bouclier sur la réserve naturelle, qui a son fonctionnement. Qu’a-t-on retenu de la COP15 ? Détruire ce que la nature nous donne gratuitement pour des espèces sonnantes et trébuchantes au nom du Tourisme ? Les faits.

Il y aura un projet de mise en place d’un complexe, selon le ministre du Tourisme

Abidjan, le 26-5-2022 (crocinfos.net) Dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie Sublime Côte d’Ivoire, conformément aux priorités du Programme cadre de gestion des aires protégées de Côte d’Ivoire, le ministère du Tourisme ne lâche pas prise la violation du site de la réserve naturelle de Dalhiafleur d’une superficie de 148 hectares. Un fait qui provoque une levée de bouclier sur la réserve naturelle, qui a son fonctionnement. Qu’a-t-on retenu de la COP15 ? Détruire ce que la nature nous donne gratuitement pour des espèces sonnantes et trébuchantes au nom du Tourisme ? Les faits.

Dans sa publication du 24-5-2022, le site https://www.sikafinance.com rapportait que la Côte d’Ivoire va enregistrer l’un des complexes hôteliers les plus importants du marché africain avec le groupe Accord prévue sur le site de la réserve naturelle de Dalhiafleur d’une superficie de 148 hectares, l’infrastructure, une smart city, va comporter 1000 chambres, en plus d’une galerie marchande et d’un parc animalier. Le projet sera mis en œuvre avec les ministères ivoiriens en charge du Tourisme et celui de l’Environnement. « (…) son intérêt pour une Côte d’Ivoire qui ambitionne se hisser au rang de 5e  destination touristique africaine à l’horizon…, mais surtout faire de l’industrie touristique et hôtelière le troisième pilier économique du pays. »

Une information fournie par Klo Fagama, directeur général de l’Industrie touristique et hôtelière, qui intervenait sur ‘’Le développement du tourisme en Côte d’Ivoire’’, le mardi 12 avril 2022 à Abidjan, à la conférence de presse ‘’Tout Savoir Sur’’ du Centre d’Information et de Communication gouvernementale (Cicg) dont le lien disponible est : https://www.gouv.ci/_actualite-article.php?recordID=13387 est édifiant.

Le 25-5-2022, les réseaux sociaux s’enflamment sur la question accusent et s’interrogent, surtout que la ville d’Abidjan vient d’abriter du 9 au 20 mai, la COP15 avec pour thème : ‘’Terres, vie, patrimoine d’un monde précaire vers un avenir prospère’’. Plusieurs internautes inondent la toile dont Association Afric Art« Constat: vu sur le site Sika Finance. Nous avons vu l’article de SIKA FINANCE « le projet d’un futur hôtel du groupe français ACCOR HOTELS sur le site de la Réserve naturelle Dahlia Fleur (géré par Oipr CI Ministère de l’environnement et du développement durable) et le projet sera mise en œuvre avec le Ministère du Tourisme et des Loisirs Côte d’Ivoire et le Ministère de l’Environnement et du Développement durable » Le lien de l’article :https://www.sikafinance.com/…/cote-divoire-fairmont… À peine la COP15 terminé le 20 Mai 2022 à Abidjan sur la lutte contre la désertification en Afrique Subsaharienne ! Nous attendons plus de détails dans les prochaines heures du Ministère du Tourisme et des Loisirs Côte d’Ivoire et du Ministère de l’Environnement et du Développement durable. »

Il y a bel et bien un projet en cours

La réaction de Siandou Fofana, ministre du Tourisme n’a pas tardé. Dans un communiqué de presse du 25-5-2022, il a condamné le confrère en indiquant que l’‘’article n’est pas suffisamment documenté’’. Lui, argumente en évoquant le cadre de la mise en œuvre de la stratégie Sublime Côte d’Ivoire, conformément aux priorités du Programme cadre de gestion des aires protégées de Côte d’Ivoire que le ministère du Tourisme envisage mettre en œuvre dans le cadre d’un projet d’aménagement et de valorisation touristique de la Réserve naturelle Dalhiafleur. « C’est un projet écologique et intégré à la nature qui vise essentiellement la mise en valeur touristique du site en y intégrant intelligemment des modules écologiques qui contribueront à donner une vie à la Réserve et à la protéger de la pression urbaine », explique-t-il.

Mais ne rejette pas du revers de main, la violation de la réserve naturelle : « À terme, il est attendu de ce projet la mise en place d’un Complexe qui devrait intégrer un réceptif écologique, un parc animalier, un circuit d’écotourisme, une Maison de l’Environnement et des sites de loisirs ». Mieux, il précise que le Groupe ACCOR n’est pas porteur du projet, mais reconnaît cependant que des pourparlers préliminaires avaient été engagés avec ce groupe en vue de son intervention à la phase d’exploitation du projet, ajoutant « la Réserve naturelle de Dahliafleur n’a été ni concédée, ni vendue à un opérateur. »

Le fonctionnement des réserves naturelles répond à des dispositions universelles, selon des experts en environnement. « Le territoire des réserves naturelles est caractérisé par une grande diversité d’espèces animales et végétales, ou des formations géologiques rares et menacées. La réglementation permet d’exclure, de restreindre ou d’organiser les activités humaines qui mettent en cause le patrimoine à protéger. Sont notamment visés les travaux, la circulation des personnes, des animaux et des véhicules, les activités agricoles, pastorales et forestières. »

Ces lois mises sous l’éteignoir

Maître Vanessa Bah-Leroux, avocat inscrit au Barreau de Côte d’Ivoire lève un coin du voile sur le sujet et enfonce le ministère du Tourisme qui tient comme à la prunelle de ses yeux, à un projet d’aménagement et de valorisation touristique de la réserve naturelle Dalhiafleur avec la mise en place d’un complexe.

L’avocat rappelle que dès 2004, l’État de Côte d’Ivoire a reconnu à ce qui était alors appelé le « Domaine Dahliafleur », le statut de domaine d’utilité publique et interdisait, notamment tous travaux de nature à modifier l’état du sol, en clair il était déjà interdit d’y faire des constructions.

Ainsi,  par un décret n° 2013-127 du 20 février 2013, l’État de Côte d’Ivoire a donné au domaine Dahliafleur, le statut de réserve naturelle partielle. Selon ce décret, la réserve occupe une superficie de 148 hectares 37 ares 48 centiares située dans la commune de Bingerville. Le statut de réserve naturelle donne une protection particulière aux espaces qui le reçoivent. « En effet, lorsqu’un espace devient une réserve naturelle, il est soumis à la loi n° 2002-102 du 11 février 2002 relative à la création, à la gestion et au financement des parcs nationaux et des réserves naturelles ».

Que dit cette loi, selon Me Vanessa Bah-Leroux ?

« Tout d’abord, précisons que même si Dahliafleur a été classée comme réserve naturelle partielle, le décret de 2013 qui l’institut, prévoit qu’elle est sous le même régime que les parcs nationaux en ce qui concerne l’accès et les droits d’usage. La loi de 2002 définit ce qu’est une réserve naturelle partielle. Il s’agit d’une aire protégée et gérée dans le but de conserver un écosystème naturel en vue d’une utilisation durable pour le divertissement et l’éducation du public. Ensuite, la loi de 2002 instaure une protection stricte des réserves naturelles intégrales  et parcs nationaux.

Il est ainsi précisé que les réserves naturelles intégrales et pars nationaux font partie du domaine public inaliénable de l’Etat dès lors qu’ils sont classés. Arrêtons-nous un instant sur cette première protection. Lorsqu’on dit qu’une chose est inaliénable, en droit cela signifie que cette chose ne peut ni être vendue, ni être donnée.  Donc les réserves naturelles et parcs nationaux ne peuvent être ni vendus, ni donnés, puisqu’ils relèvent du domaine de l’Etat et sont inaliénables. 

Continuons, la loi de 2002 offre une seconde protection aux parcs nationaux.

Elle interdit en effet outre la chasse et la pêche, « tout travaux de terrassement ou de construction » ainsi que « tout travail tendant à modifier l’aspect du terrain ». Dans ces conditions, il clair qu’il est impossible en l’état actuel de procéder à la construction d’un hôtel dans la réserve naturelle Dahliafleur, dès lors que la loi l’interdit strictement. Poursuivons la lecture de la loi de 2002 concernant la modification des limites d’une réserve naturelle ou d’un parc national. Il est prescrit par cette loi que toute modification des limites doit être précédée d’une étude d’impact environnemental.

Terminons enfin par les sanctions prévues par la loi de 2002. Elle sanctionne d’une peine de deux mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 1.000.000 à 25.000.000 FCFA, le fait d’entreprendre des constructions dans un parc national ou une réserve naturelle. Les peines sont doublées lorsque les dommages causés au milieu naturel sont irréversibles. En conclusion, qu’un projet de construction dans une réserve naturelle ait pu être envisagé est une hérésie compte tenu de la législation ivoirienne extrêmement protectrice des parcs nationaux et réserves naturelles.

La préservation de la nature ne peut s’effacer devant un pseudo développement qui aboutirait à détruire définitivement le peu d’espaces naturels que nous devons transmettre aux générations. »

Le mot partiel ajouté à la réserve naturelle change-t-il les dispositions prises pour le fonctionnement normal d’une réserve naturelle proprement dite ? Le président de la République, Alassane Ouattara, est-il suffisamment informé et dans les moindres détails d’un projet qui mettra en mal  la préservation de ce milieu naturel fonctionnel, écologiquement représentatif et à forte valeur patrimoniale ?

Le ver est encore dans le fruit et la pilule, difficile à avaler au moment où la COP15 vient de baisser le rideau à Abidjan (Côte d’Ivoire) contre la déforestation en invitant les peuples à la restauration des forêts.

Bienvenue R. Kwado


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