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C R O C I N F O S

[Conflit de succession à Abobo-Baoulé] La génération Tchagba dénonce une forfaiture

[Conflit de succession à Abobo-Baoulé] La génération Tchagba dénonce une forfaiture

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Le village d'Abobo-Baoulé est secoué par un conflit de succession autour de la désignation du doyen d'âge et de l'intronisation d'un nouveau chef. La génération Tchagba dénonce une usurpation des traditions Atchan.

Abidjan, le 22 février 2025 (crocinfos.net)---Le village d'Abobo-Baoulé traverse une crise coutumière majeure. La génération Tchagba conteste la nomination d'Assagou Ahibé Michel comme doyen d'âge et l'intronisation imminente d'Akré Nandjui Marc comme chef du village. Cette contestation met en lumière les défis de la préservation des traditions Atchan face à des décisions jugées arbitraires.


Un processus de succession contesté

Les membres de la génération Tchagba, par la voix de leur porte-parole, Assin Armand Hubert, ont exprimé leur rejet de ces nominations, réunis en conférence de presse le samedi 22 février 2025. Selon eux, la désignation du doyen d'âge repose sur un principe immuable : c'est l'homme le plus âgé qui doit occuper cette position, garantissant ainsi la transmission des savoirs et des coutumes. Or, d'après les contestataires, Assagou Ahibé Michel ne répond pas à ce critère. "La liste des doyens encore en vie démontre qu'il n'est pas le plus âgé. Cette nomination est une usurpation pure et simple", s'insurge Assin Armand Hubert, rappelant que le véritable doyen, Djonka Clément, est toujours en fonction.

Dans la société Atchan, la transmission du titre de doyen d'âge repose sur une règle fondamentale et inaltérable : l'âge. Ce principe ancestral établit que le plus âgé des hommes du village se voit confier cette fonction hautement symbolique.


‘’Cette désignation ne respecte pas la coutume établie, puisqu'elle aurait écarté l'actuel doyen légitime, Nanan Djonka Clément, au profit d'un cadet.’’


En tant que gardien des traditions et mémoire vivante de la communauté, le doyen d'âge joue un rôle essentiel dans la préservation des us et coutumes.

Or, cette tradition aurait été bafouée lors de la récente nomination d'Assagou Ahibé Michel. Selon les contestataires, cette désignation ne respecte pas la coutume établie, puisqu'elle aurait écarté l'actuel doyen légitime, Nanan Djonka Clément, au profit d'un cadet. Ce choix, qualifié d'"usurpation pure et simple", soulève de vives tensions au sein de la communauté.


‘’On ne s'improvise pas chef  chez les Atchan’’

Selon Assin Armand Hubert, la liste officielle des doyens encore en vie prouve qu'Assagou Ahibé Michel ne peut prétendre à ce titre, appartenant à une génération plus jeune, la classe Gnandoh Agban. En réalité, c'est Djonka Clément, membre d'une classe d'âge antérieure, qui est l'actuel doyen légitime.

"Chez les Atchan, on ne s'improvise pas chef. Il faut le consensus du peuple et le respect des règles traditionnelles", affirme Assin Armand Hubert. Il dénonce également des ingérences extérieures cherchant à manipuler les institutions coutumières à des fins personnelles.

Face à cette situation, un recours a été déposé devant le Conseil d'État pour contester l'arrêté préfectoral validant l'intronisation de Marc Akré. Pourtant, ce dernier maintient son calendrier : la cérémonie d'intronisation d'Assagou Ahibé Michel en tant que Nanan est prévue pour le 28 février 2025, suivie de sa propre intronisation le 22 mars 2025.

Lors de cette rencontre capitale pour l'avenir du village, le doyen d'âge, Nanan Djonka Clément, a pris la parole afin d'exprimer son inquiétude face à la situation actuelle. Son discours, empreint de sagesse et d'un profond attachement à la paix, a mis en lumière les tensions qui persistent autour de la désignation du chef du village.


‘’Cette situation de blocage préoccupe profondément le doyen d'âge, qui redoute les conséquences d'une telle incertitude sur la stabilité du village.’’


Dès le début de son intervention, Nanan Djonka Clément a rappelé son engagement indéfectible en faveur de l'harmonie et de l'unité au sein de la communauté. « Jusqu'à présent, j'ai veillé à préserver l'harmonie du village, son unité et sa paix, et je continue de le faire, car je ne veux pas de conflit. Je ne suis pas un homme belliqueux », a-t-il affirmé avec fermeté.

Toutefois, malgré sa volonté de conciliation et sa participation active aux démarches entreprises pour désigner un chef légitime, le processus s'est enlisé dans une impasse. Cette situation de blocage préoccupe profondément le doyen d'âge, qui redoute les conséquences d'une telle incertitude sur la stabilité du village.


Une crise aux conséquences profondes

La situation actuelle à Abobo-Baoulé suscite de vives inquiétudes quant à ses répercussions sur la communauté. En premier lieu, la désignation contestée d'un leader local pourrait provoquer une division au sein des familles, ce qui affaiblirait la cohésion sociale et créerait des tensions palpables. De plus, l'autorité traditionnelle, déjà mise à mal, risque de perdre davantage de crédibilité, ce qui pourrait entraîner sa marginalisation et un affaiblissement des structures de gouvernance locales. Sur un plan spirituel, les croyances Atchan soulignent l'importance du respect des traditions, et tout manquement à cet égard pourrait susciter la colère des ancêtres, ajoutant une dimension sacrée à la crise. Enfin, la situation pourrait dégénérer en escalade juridique et physique, avec un recours déjà déposé devant la justice, ce qui ne fait qu'exacerber les tensions existantes. Nos tentatives pour joindre Akré Nandjui Marc afin d'obtenir sa version des faits n'ont malheureusement pas abouti.

Médard KOFFI