A 6 jours de sa fermeture, une délégation de la section du PDCI de Gagnoa s’est rendue le vendredi 14 mars dernier à la Rotonde des Arts d’Abidjan-Plateau, pour voir l’exposition de photos et écritures qui qui fascine et relate l’histoire de l’amitié entre Cheick Yacouba Sylla et le Président Houphët-Boigny.

Dans la soirée du vendredi 14 mars, la météo est clémente, tout est calme, tout est beau aux alentours et l’air frais. Les conditions sont meilleures, et sous l’hymne des oiseaux qui peuplent le secteur, le Professeur Yacouba Sylla, enseignant et écrivain accueille la délégation PDCI de Gagnoa à son exposition.

La cérémonie commence par des échanges de nouvelles de quelques minutes, entre lui et le Ministre Maurice Kacou Guikahué, chef de la délégation. Puis, à ses hôtes, Pr Yacouba Sylla explique ses motivations, et les objectifs de son activité qui met en lumière l’amitié entre son grand-père Cheick Yacouba Sylla et Félix Houphouët-Boigny. On évoque quelques souvenirs et des anecdotes racontées par le Ministre Guikahué, puis on fait un tour guidé de l’exposition, sous le guide de l’auteur.

Pendant une heure d’horloge, Pr Yacouba Sylla embarque ses visiteurs pour un véritable chemin de croix pas du tout ennuyeux. A chaque station, on se laisse plutôt émerveiller devant les images commentées et les écritures émouvantes. Celles-ci révèlent l’histoire d’une amitié si forte et les relations très étroites qui liaient le guide Cheick Yacouba Sylla et le Président Félix Houphouët-Boigny, père fondateur du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) et premier Président de la République ivoirienne, cité par l’exposition. C’est tout le sens de la visite de cette délégation du PDCI-RDA de Gagnoa.

L’exposition révèle que Cheick Yacouba Sylla origine du Mali, guide religieux musulman né à Nioro du Sahel (actuel Mali) vers 1906. Pendant qu’il menait un mouvement de lutte contre le colonialisme, il fut arrêté en 1930 en Mauritanie avec ses amis appelés les ‘’Yacoubistes’’. Puis lui et certains de ses compagnons de luttes furent ensuite « déportés de force » en Côte d’Ivoire. Cheick Yacouba Sylla fut séparé de ses amis et mis en prison à Sassandra, dans la ville balnéaire au sud-ouest ivoirien, Huit ans plus tard, il fut libéré en 1938, et décida de s’installer dans la ville de Gagnoa qui lui avait servi de transit pendant sa déportation à Sassandra.  Cette cité du fromager s’ouvrit comme une terre de bénédiction, où coule le lait et le miel. C’est ici, qu’à partir de 1939, il bâtit sa réputation de riche homme parmi les premiers milliardaires.  Grand commerçant, premier transporteur de voyageurs autocariste sur l’axe Gagnoa-Abidjan-Gagnoa. Il eut avant tout, l’ingénieuse idée de réaliser de grandes plantations agricoles en Côte d’Ivoire, et de révolutionner le transport des passagers. Il mit alors sur les routes, d’abord, des voitures 405 et 504 de transport de neuf (9) places au tarif de 500 FCFA. On retrouvait de même le nom Yacouba Sylla sur les tout premiers cars de transport public en Côte d’Ivoire, mis en route sur l’axe Gagnoa-Abidjan-Gagnoa, à des tarifs sociaux de 400 FCFA.

Mais surtout un grand amoureux de la culture, ainsi Yacouba Sylla se lança dans le commerce de films cinématographiques en créant dans plusieurs villes ivoiriennes, des salles de Cinéma Pax Yacouba Sylla grand écran qui furent de véritables centres de loisirs urbains pour les populations à une époque de la Côte d’Ivoire indépendante et moderne.

Pour les anciens, l’homme était un grand humaniste, d’une grande générosité reconnue, offrant gîte et/ou couvert aux plus pauvres, aux démunis, aux indigents, sans distinction de nationalité ni de religion, dans sa cité familiale qui ouvre ses regards d’un côté sur la maison de la préfecture et les bureaux de la Sous-préfecture, et de l’autre, sur la première grande agence locale de la Société Générale de banques en Côte d’Ivoire fondée en 1962, aujourd’hui connue sous le nom de Société Générale Côte d’Ivoire. Pour beaucoup, Yacouba Sylla avait ce don de libéralité extraordinaire et rare, et qui faisait de lui, le ‘’Père de la charité.’’

Dès 1945, Yacouba Sylla reçut la visite de Félix Houphouët-Boigny, lui aussi leader politique anticolonialiste. Et ce fut le début d’une si longue et forte amitié entre les deux hommes (Cf. les nombreuses correspondances écrites entre les deux hommes). Ensemble, ils vont trouver la stratégie pour la mise en place du Rassemblement Démocratique Africain (RDA), naissance d’un mouvement politique qui bénéficia du soutien financier du guide musulman. Par la suite ce fut autour du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI) une branche du RDA, d’où le nom PDCI-RDA.

Yacouba Sylla en devint le Représentant à Gagnoa, et mena des combats pour son ami Houphouët-Boigny, jusqu’à son élection à l’Assemblée nationale française.  « On savait plus ou moins qui était Yacouba Sylla, mais on ne lui connaissait pas ce côté politique-là, mais c’est que ce l’exposition nous révèle aujourd’hui », avoue le Maire de Diégonéfla.

Mais on pouvait dire Houphouët-Boigny et Yacouba Sylla, même lutte, même combat, puisque les deux hommes sont les partisans et artisans de la paix, du dialogue, et de la cohésion sociale. »

Valéry Kelly