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L’ancien ministre ivoirien Gnamien Konan a dénoncé les cours magistraux, jugés inefficaces face à la massification universitaire, et appelle à leur remplacement par l’usage des outils numériques pour améliorer la qualité de l’enseignement supérieur.
L’ancien ministre ivoirien de l’Enseignement supérieur, Gnamien Konan, a qualifié jeudi sur sa page Facebook le cours magistral de « l’une des plus grandes escroqueries intellectuelles du siècle », estimant qu’il est urgent pour l’Afrique de tourner la page de cette méthode jugée obsolète au profit des outils numériques.
« Que peut-on enseigner à 500 étudiants agglutinés dans une salle, distraits pour la plupart ? », a interrogé l’ancien ministre, rappelant que ces cours sont en général confiés aux enseignants les plus qualifiés, « ceux dont les explications devraient justement être les plus précieuses ».
Pour M. Konan, la solution réside dans une réforme profonde de la pédagogie universitaire. Il propose que les professeurs mettent à disposition leurs cours dès le début de la session sur un support électronique accessible à tous. Les étudiants pourraient ensuite poser leurs questions par courrier électronique, auxquelles l’enseignant répondrait individuellement. Les interrogations les plus pertinentes seraient enfin reprises dans le cadre des travaux dirigés par les assistants.
Une pratique jugée « dépassée »
L’ancien ministre a dénoncé « un carnaval académique », rappelant que de nombreux enseignants aujourd’hui titulaires ou agrégés n’assistaient pas systématiquement aux cours magistraux lorsqu’ils étaient étudiants. « Certains se contentaient de photocopies ou s’organisaient en groupes pour prendre des notes à tour de rôle », a-t-il ajouté.
Cette critique, récurrente dans plusieurs pays africains, met en lumière les limites d’un système universitaire confronté à la massification des effectifs. En Côte d’Ivoire, les amphithéâtres accueillent parfois plus d’un millier d’étudiants, avec des conditions d’apprentissage rendues difficiles par le manque de places assises, la qualité sonore médiocre et une interaction quasi inexistante entre enseignants et étudiants.
Un défi partagé en Afrique de l’Ouest
La problématique n’est pas propre à la Côte d’Ivoire. Au Sénégal, au Bénin ou encore au Burkina Faso, les universités publiques font face au même défi : comment maintenir la qualité de l’enseignement supérieur face à l’explosion démographique et aux ressources limitées ?
Ces dernières années, plusieurs réformes ont été engagées. À Dakar, l’université Cheikh Anta Diop expérimente des plateformes numériques de mise à disposition des cours. Au Nigeria, certains établissements ont adopté des systèmes de e-learning, notamment depuis la pandémie de Covid-19 qui a accéléré le recours à l’enseignement à distance. Mais ces initiatives restent encore limitées par l’accès inégal aux infrastructures numériques et aux connexions Internet.
Un appel à saisir les opportunités technologiques
Pour Gnamien Konan, l’heure est venue de repenser le modèle. « En 2025, avec tous les problèmes dus à la massification dans nos pays pauvres et très endettés, il est grand temps de saisir toutes les opportunités techniques pour améliorer l’efficacité interne et externe », a-t-il insisté.
« Ceux qui persistent à faire les choses comme on les a toujours faites ne rattrapent jamais les autres », a-t-il encore prévenu, estimant que l’Afrique ne peut se permettre de rester en marge des révolutions pédagogiques en cours.
Alors que la rentrée universitaire 2025-2026 s’annonce dans un contexte marqué par des tensions budgétaires et la nécessité de moderniser les infrastructures, cette prise de position ravive le débat sur l’avenir de l’enseignement supérieur en Côte d’Ivoire et au-delà.
Athanase Kangah