Soumahoro Mamadou, président de la MTCI
Soumahoro Mamadou, président de la MTCI, alerte sur de graves dérives à la MATCA : falsification d’agrément, détournements massifs et opacité de gestion, affectant directement les sociétaires des taxis-compteurs d’Abidjan et l'économie ivoirienne.
Abidjan, le 22 mai 2025 (crocinfos.net)--- « La MATCA va très mal », lance d’un ton grave Soumahoro Mamadou. Le président de la Mutuelle des Taxis-Compteurs d’Abidjan (MTCI) et porte-parole du Collectif des Syndicats des Transporteurs pour le Changement à la MATCA (CSTCA) tire la sonnette d’alarme : les sociétaires souffrent, et la situation a des répercussions bien au-delà du secteur du transport, touchant toute la Côte d’Ivoire.
Selon lui, depuis plus d’une décennie, des individus ont confisqué illégalement la gouvernance de la MATCA par des pratiques frauduleuses flagrantes. Pourtant, l’accession aux fonctions dirigeantes de cette mutuelle est encadrée par un dispositif strict : élection, investiture, transmission des dossiers à la Direction Nationale des Assurances, validation par le ministère du Budget, puis envoi à la CIMA (Conférence Interafricaine des Marchés d’Assurance), seule instance habilitée à délivrer les agréments aux dirigeants.
Or, Messieurs Fama Touré et Guédou Élie, l’ex-Président du Conseil d’Administration (PCA) et Directeur Général (DG), auraient sciemment contourné cette procédure. « Nous détenons la preuve d’un faux agrément daté du 1er avril 2013, attribué à M. Fama Touré et prétendument signé par M. Dimba Samba Diallo », affirme Soumahoro Mamadou. Ce dernier, dans une lettre datée du 29 avril 2013 adressée au ministère ivoirien de l’Économie et des Finances, a formellement nié être l’auteur du document. Malgré cette mise au point officielle, ledit agrément a été publié à la Une du journal L’Expression (N°1106), dans ce que le porte-parole qualifie de « véritable scandale ».
Mais les accusations ne s’arrêtent pas là. La MATCA, censée être placée sous une surveillance constante, aurait laissé échapper des dizaines de milliards de francs CFA sans la moindre justification. « Tout décaissement supérieur à 500 000 francs CFA devait pourtant être validé par le Conseil d’administration, la Direction Générale et la Direction Nationale des Assurances », rappelle-t-il.
Un autre point de crispation porte sur l’immeuble baptisé KM. Sa simple réfection de façade aurait coûté 250 millions de FCFA, avant que le bâtiment ne soit détruit quelques années plus tard pour un montant supplémentaire de 172 millions de FCFA. Plus de 400 millions auraient ainsi été engloutis, sans facture, ni appel d’offres, ni documentation présentée aux sociétaires.
Interrogé sur le fonctionnement global de la mutuelle, M. Guédou Élie aurait également éludé des questions essentielles. Des documents reçus par le CSTCA montrent que la MATCA est devenue actionnaire d’une institution de microfinance, CRED AFRICA, sans l’aval du Conseil d’administration. Plus grave encore : des fonds auraient été transférés à des entreprises externes sous forme de prêts, sans qu’aucun cadre juridique ne soit précisé.
Face à ces dysfonctionnements, le CSTCA a décidé d’engager une procédure judiciaire contre M. Guédou Élie. « Je n’ambitionne aucun poste à la MATCA. Je suis entrepreneur et je vis de mes affaires. Mon seul objectif est la défense du bien commun », insiste Soumahoro Mamadou. « Il est inadmissible de voir des collègues sociétaires souffrir tandis que certains s’enrichissent illicitement. »
Un audit a été lancé sous la direction du DG intérimaire, M. Séri Kanon Roger, dont les premières conclusions sont jugées alarmantes, bien que le processus ne soit qu’à 30 % de son avancement. Pourtant, à la surprise générale, le gouvernement a récemment décidé de nommer un administrateur provisoire, alors que M. Séri Kanon est en mission à l’étranger.
Le CSTCA déplore cette précipitation et appelle à laisser l’audit suivre son cours jusqu’à son terme. « La justice aurait pu se saisir du dossier sur la base des conclusions. Pourquoi interférer ? », s’interroge Soumahoro Mamadou.
La nomination de M. Dicoh Balamine comme administrateur provisoire suscite par ailleurs la défiance. Connu pour avoir déjà travaillé à la MATCA sous l’ère Kassoum Coulibaly, il avait été licencié sans qu’aucune explication ne soit donnée. « Nous ignorons les raisons de ce départ, mais cela nourrit notre méfiance. Nous ne voulons pas de lui pour le moment », tranche-t-il.
Face à cette situation, les membres du CSTCA réclament une révision immédiate de la décision gouvernementale. À défaut, une réunion de crise se tiendra le vendredi 23 mai 2025.
« Pour la transparence, pour la justice et pour l’avenir de notre mutuelle », conclut Soumahoro Mamadou avec gravité.
Seriba Koné