[Homophobie dans le football] Lâché par le PSG, Idrissa Gana Gueye reçoit le soutien de Macky Sall

-La société civile sénégalaise aussi

Abidjan, le 17-5-2022 (crocinfos.net) Le milieu de terrain sénégalais du PSG, Idrissa Gana Gueye, n’a pas joué samedi 15 mai 2022, à l’occasion de la Journée mondiale dédiée à la lutte contre l’homophobie. Une nouvelle absence qui crée la polémique au moment où, son club a pris fait et cause pour cette journée.

Le milieu de terrain du PSG et des Lions de la Teranga du Sénégal, Idrissa Gana Gueye, a déjà décliné poliment cette lutte contre l’homophobie en 2021, évoquant une ‘’gastro-entérite’’ pour ne pas avoir à jouer.

Cette année, les réseaux sociaux, la presse, les médias et, même le club du joueur sont dans la danse pour se désolidariser d’Idriss Gana Gueye. ‘’Dans le cadre de la journée mondiale contre l’homophobie du 17 mai, la Ligue1 se mobilise. Les maillots parisiens reprennent le drapeau arc-en-ciel, symbole de paix, de diversité et symbole par excellence du mouvement LGBT’’. Tweetait le Paris Saint-Germain (PSG), le 14 mai 2022, avec les images des maillots de stars comme Sergio Ramos, Kylian MBappé et Hakimi, prises depuis les vestiaires.

Messi, Neymar, Mbappé… aux couleurs arc-en-ciel

Contacté par l’AFP, le PSG rappelle être ‘’complètement engagé dans la lutte contre l’homophobie et les discriminations, avec Sportitude ou SOS Racisme. Nos joueurs ont porté avec fierté ce maillot, les plus grandes stars, Messi, Neymar ou Mbappé, exprimant l’engagement du club’’.

En 2019, plusieurs joueurs avaient refusé d’arborer un brassard arc-en-ciel. ‘’Il y a encore des résistances, mais ça avance’’, résume Bertrand Lambert.

L’ancien joueur, Ouissem Belgacem l’auteur du témoignage remarqué « Adieu ma honte » (Fayard) en mai 2021, sur l’homophobie dans le football, revient sur la polémique née autour du cas Idrissa Gueye, samedi. « Idrissa Gueye est le résultat d’un système », estime-t-il.

Interrogé ce lundi par 20 Minutes, Ouissem Belgacem évoque sa déception devant ce type de comportement, mais remarque aussi que la démarche de l’instance qui régit le football professionnel français s’apparente à du « pinkwashing » (Expression critique décrivant l’utilisation (abusive) de la couleur rose (pink) par une entreprise, à dessein pour évoquer son soutien à la recherche sur le cancer du sein.)

Dans cette interview, Ouissem Belgacem indique que, s’il était avéré qu’Idrissa Gueye n’a pas voulu jouer pour des raisons religieuses, « je trouverais ça extrêmement décevant. »

Il prouve déjà les limites de cette opération de la LFP (Ligue française de football), avec ces maillots floqués aux couleurs arc-en-ciel. « Je sais qu’il y a plein de joueurs qui les portent seulement parce qu’ils doivent les porter, mais qui ne sont pas sensibilisés à la cause. On ne voit aucun post Instagram de joueurs indiquant qu’ils sont fiers d’avoir participé à cette journée. J’ai l’impression que c’est plus un coup de com’ qu’un travail d’éducation et de sensibilisation auprès des joueurs, du public, des entraîneurs… », renchérit-il.

‘’La dénonciation des injustices’’

Pour en revenir au comportement d’Idrissa Gueye, des raisons religieuses sont évoquées. Lui aussi, affirme qu’il est musulman et c’est toujours intéressant et triste de voir qu’on peut porter une religion de manière aussi différente. « Pour moi, l’Islam est avant tout une religion de tolérance, de paix, d’amour du prochain, où l’on ne doit pas se juger les uns les autres. Ce qui nous réunit tous au final, c’est la dénonciation des injustices. Aujourd’hui, quand on est homo en France, on va clairement souffrir de l’homophobie dans tous les secteurs de sa vie », explique l’ancien joueur.

À l’en croire, le football, c’est le vivre-ensemble en théorie. Il trouve dommage qu’Idrissa Gueye ne se sente pas touché par cette cause en tant qu’être humain, et regrettable que le PSG ait des employés pas prêts à dénoncer les injustices, à se battre contre cela. « Au final, c’est une question d’humanisme. On ne demande pas à un joueur d’aller ouvrir la Gay Pride, simplement d’apporter un soutien assez discret pour faire reculer l’homophobie en France », condamne Ouissem Belgacem.

‘’ Fière d’être ce que l’on est et fier d’être musulman’’. Tweet Gana Gueye le lundi 16 mai, avec comme photo d’illustration, une image prise à la Mecque.

Gana, seul contre tous, mais…

Seul contre tous, le milieu de terrain sénégalais a aussi le soutien de la société civile de son pays. En témoigne le communiqué du mouvement Y en a marre, actif notamment dans la défense de la démocratie. Il ‘’dénonce avec vigueur cette diabolisation dont il (Gueye) est victime’’. Il appelle ‘’le ministère des Sports et la Fédération sénégalaise de football à apporter un soutien officiel à Gana dans ces moments difficiles’’. L’écrivain El Hamidou Kassé n’est pas resté en marge du soutien ‘’au nom du principe de la libre croyance et du respect des différences’’.

Dans ce pays musulman à 95 % et très pratiquant, l’homosexualité, punie d’une peine d’un à cinq ans de prison, est largement considérée comme une déviance, selon le confrère de France 24. D’où, le soutien du président de la République du Sénégal pour boucler la boucle des soutiens à Gana Gueye. « Je soutiens Idrissa Gana Gueye. Ses convictions religieuses doivent être respectées », coupe court Macky Sall.

La Ligue française va-t-elle surmonter ‘’les limites’’ de cette opération, l’année prochaine, pour laquelle les maillots sont floqués aux couleurs arc-en-ciel ?

Les prises de positions et les choix pour accorder les violons à l’homophobie dans le football divergent, selon la compréhension de la religion que pratiquent les joueurs.

Bienvenue R. Kwado